12 décembre 2006

Réunion d'agence

Ce soir, je me suis auto dispensé de la réunion d'agence. Je n'étais pas dans un bon jour et je n'avais pas envie de subir cet affligeant concert d'instruments à vent (surtout du pipeau). Normal pour des brasseurs d'airs qui nous le pompe me fera-t-on remarquer.

J'angoissais à l'idée du matraquage du directeur d'agence, à grands renforts de formules toutes faites comme "il y a du buisness à prendre", "on va faire du chiffre" ou bien encore "on sent que le marché reprend". Il n'aurait pas manqué d'annoncer que la société pouvait se targuer d'une croissance de 10% de ses revenus sur le dernier exercice fiscal. J'avais très peur d'intervenir d'une petite pointe en rappelant que j'avais été augmenté de 3% et de demander où était passés les 7% restants; dans le budget formation peut-être ...
De quoi devrais-je me plaindre; certains s'étaient vus promettre une prime de résultat, fournie seulement en partie un an plus tard, déduite de l'augmentation de leur entretien annuel et s'étaient vus interdits de prime de vacances sous prétexte d'avoir déja eu une prime. (Réfléchissez bien, sa prime on la lui a donné une fois et retirée deux fois ...)

J'ai quand même fait un tour à mon agence où j'ai passé mon temps à balancer sur ma mission et mon environnement de travail devant les jeunes recrues. J'aurais eu plus vite fait de distribuer des cartes de visite avec l'URL de ce site en me promenant avec un t-shirt estampillé "je suis le Docteur Schizzo".
J'ai expliqué à mon délégué du personnel que je pétais les plombs et que j'avais le choix entre arrêter la mission et être arrêté pour dépression. Il m'a répondu que le but était de faire durer la mission donc que je devrais choisir la dépression parce que ce ne serait pas à la boîte de payer.
Défoncé aux anti-dépresseurs et aux anxiolytiques, je n'ai pas eu le réflexe de l'exécuter sommairement, je m'en excuse.

À un ancien collègue ayant fait une mission chez le même client que moi actuellement, j'ai décrit un fainéant fini, incapable d'aligner deux lignes de code cohérentes et un supérieur hiérarchique qui passait son temps en réunions stériles pour faire des plannings.
Il a reconnu nommément mon collègue et mon n+2. Je n'ai pas parlé de mon n+1 de manager car ils sont potes mais ça me rassure tout de même de savoir que dans la jungle du travail, certains connaîssent et on reconnaîssent les glands.

Mon commercial, quant à lui, à demandé à me parler. Un peu comme ma mère quand j'étais adolescent; je déteste les conversation qui commencent par "il faut qu'on parle".
Lorsque j'avais soulevé auprès de mon commercial les problèmes rencontrés lors de ma mission actuelle, j'avais été réconforté par sa réponse: "je préfère perdre le client que toi". Je me sentais mieux loti que d'autres collègues externes moins fortunés dont le commercial avait comme seule et unique solution de laisser pourrir.
Depuis le discours a changé, il est important que chez le client "je me positionne bien", que je sache "saisir des oportunités". À la réflexion je me demande si cette technique "bon puis mauvais" n'est pas plus insidieuse.

J'ai eu droit à un remontage de bretelles en règles, je n'ai pas fait assez pour rester chez le client (normal puisque je souhaite plus que tout en sortir). On me demande donc maintenant de tout mettre en œuvre pour rester; chercher une autre mission, une autre filliale. On m'ordonne de me contrefoutre de la fin de ma mission, l'important c'est l'avenir. "Après toi le délugé".
Il faut que j'appelle, que je mail à toutes les personnes que je connais, des fois qu'ils aient une mission. Ben oui, c'est ça, je vais faire ton boulot en plus du mien; je vais aller me vendre comme une pute. "Ingénieur trépané cherche mission pour manger et enrichir sa société".

À défaut, il me propose une mission entre Noël et le jour de l'an pour remplacer un collègue qui a pris ses congés sans demander l'avis du client. Un peu normal puisqu'on a envoyé le-dit collègue à deux heures de chez lui, alors qu'il sortait d'une mission à une heure de chez lui et avait clairement signifié ne pas vouloir recommencer pour profiter de sa petite dernière.
Et après on nous promet des missions de proximité en réunion d'agence.

Sinon il y a bien une solution de proximité pour moi: un temps partiel; à condition que je n'ai rien contre une diminution significative de mes émoluments déjà forts modestes. Mais il me rassure: c'est une mission de prestige qui payera bien.
Une mission qui paye bien par un ingénieur qu'on paye moins.
C'est moi qui délire ou tout le monde s'est tartiné la gueule de configure de con aujourd'hui ?

Là dessus il enchaîne, mieleux, sur un discours commercial synthétique; lavable en machine à 30 degrés. On parle de ma vie, de mes petits problèmes personnels, la femme, les enfants ...
Tiens, d'ailleurs ça me rappelle qu'ils m'attendent.

En partant, je croise l'attachée aux ressourches (in)humaines. Elle aussi à l'air d'en avoir marre. Difficile quand il n'y a pas de client et qu'on doit implorer l'obole. Ou alors elle est experte ès techniques de manipulations mentales par empathie. J'hésite encore entre la paranoïa et la candeur ...
Elle s'insurge des missions qu'on me propose mais elle est un peu comme la Société Des Nations, dépourvue de force coercitive.

Enfin bref, j'ai mis fin à cette mascarade; fort heureusement pour le parpaing qui traine dans mon estomac. Ça a beaucoup jasé dans mon dos mais:
rien à foutre
rien à blanler
rien à braire
rien à cirer
...

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